Il y a des semaines où les rencontres autour de la chose vinique se multiplient et où un blogueur amateur comme moi a beaucoup de
mal à suivre dans la tenue de ses chroniques viniques : après une journée à Eguisheim en compagnie de Christian Beyer, une session du club A.O.C., une visite rapide au domaine de l’Oriel, un
salon des vins au Bollenberg, voilà que mon ami Jean-Claude (50 années de fidélité cette année…on ne pourra pas dire que je l’ai choisi pour sa cave !) me propose de me joindre à un groupe
d’amateurs de vins qu’il a convié pour une verticale de Bienvenues-Bâtard-Montrachet…dans certaines situations il faut vraiment accepter de se laisser déborder par le
travail !
Deux plateaux de fromages à pâte cuite, quelques conserves de foie gras et de rillettes de canard et un alignement de 10 flacons d
Grand Cru : voilà une table capable de faire frétiller les papilles les plus exigeantes !
L’ambiance est festive et je n’ai pas trop envie de dégainer mon carnet de notes pour relever mes sensations en direct.
Les vins sont présentés bouteilles découvertes et les commentaires sont rédigés le lendemain en fonction de sensations mémorisées lors de cette soirée.
Bienvenues-Bâtard-Montrachet
Louis Carillon et fils à Puligny Montrachet
2009 : charmeur et généreux dès la première approche ce vin est soutenu par une minéralité
profonde.
Opulent, flatteur mais encore jeune.
2008 : un vin équilibré et racé avec une acidité franche et noble, une matière riche et
grasse.
En devenir mais déjà d’une grande élégance.
2007 : une olfaction plus ouverte (tilleul, craie humide et une pointe finement boisée), une
bouche stricte et tendue avec un gras très raffiné.
Une minéralité intense qui commence à parler…et qu’on écoute religieusement !
2006 : une olfaction épanouie sur le tilleul, le citron et le silex, une bouche puissante,
tonique et très longuement aromatique.
Regoûté le lendemain, ce vin avait encore gagné en profondeur et en minéralité avec un côté pierreux presque palpable en bouche.
Un Grand Cru ouvert et racé…Magnifique !
2005 : plus évolué au nez avec des arômes de miel et un fruité bien mûr, en bouche, après une
attaque confortablement ronde, la minéralité impose sa puissance.
Le lendemain l’équilibre du vin s’était posé avec sérénité offrant une longueur aromatique finale impressionnante
Un vin qui a eu besoin d’une nuit pour montrer sa grandeur…Exceptionnel, mais visiblement encore loin de son apogée
!
2004 : un nez précis et fin où on cherche vainement les marqueurs végétaux du millésime, une
bouche équilibrée, profonde qui finit sur la fraîcheur et la minéralité.
Le lendemain, la palette aromatique s’est définie davantage avec des nuances de mélisse, de verveine et de citron mûr, le toucher de bouche est resté très minéral
et la finale a gardé sa fraîcheur et sa pureté.
Un vin déjà superbe le soir avec une place d’honneur (4° dans mon classement perso)…mais la magie a vraiment opéré le lendemain.
MIAM !
2003 : un nez ouvert et flatteur sur les fruits jaunes (prune, mirabelle) et quelques épices
douces, une bouche gourmande qui se livre avec une grande facilité.
Séducteur…mais peut-être un peu trop !
2002 : un nez complexe, raffiné et d’une grande précision, une bouche parfaite où une
minéralité intense et un gras charmeur s’équilibrent à la perfection.
Un grand vin dans la plénitude de ses moyens…Une pure merveille !
2000 : un nez douteux sur le miel et la compote de pomme, une bouche plate et fatigué qui
confirme les craintes…
Oxydation prématurée…Dommage !
1999 : complexité et raffinement au nez (fleurs, tilleul, craie), remarquable d’équilibre et
de gourmandise en bouche avec une finale interminable…Parfait !
Comme pour le 2002, plénitude et maturité optimale…une autre merveille !
Pour conclure :
- Jean-Claude fait partie de ces œnophiles qui n’apprécient pleinement leurs vins que lorsqu’ils peuvent les partager
entre amis…et je peux dire que ce soir nous étions quelques uns à être très heureux de pouvoir lui faire plaisir…
C’est bien la première fois que je me retrouve face à 10 bouteilles de Grands Crus bourguignons…une expérience rare pour
un amateur comme moi.
Merci Hans !
- Hormis le 2000, toutes les bouteilles se sont montrées dignes de leur statut de vin d’exception, mais sur mon podium
personnel je placerai sans hésiter et dans l’ordre : le 2002, le 1999 et le 2006 (talonné de près par le 2004)… en fait, avec le 2008 encore jeune mais plein de promesses, je dirai que chez
les Carillon, les réussites de la première décennie du XXI° siècle sont à situer dans les années paires…et les 2010 dégustés cet été chez François Carillon ne vont pas déroger à la
règle.
- sur cette verticale on a également pu constater que les très grands vins ont vraiment besoin de quelques années de garde
pour exprimer leur classe : les vins jeunes sont très beaux (2009 à 2005) mais ils n’ont pas encore cette profondeur et cette complexité qui les rend vraiment incomparables. Les trois
bouteilles que j’ai eu la chance de pouvoir regoûter le lendemain me confortent dans cette idée : après quelques heures en bouteilles vidées aux ¾ les vins sont apparus plus ouverts, plus
complexes et plus harmonieux.
- malgré tout, cette soirée me laisse un petit pincement au cœur : l’ambiance conviviale et détendue aidant, nous
avons finalement très peu parlé de ces vins magnifiques…en tous cas, pas assez à mon goût car je pense que ces aristocrates de la Côte d’Or méritaient une assemblée un peu plus attentive et des
échanges un peu plus riches. Dommage, mais bon ne soyons pas rabat-joie, ce fut une magnifique expérience !