L’été et la Fête de la Musique, c’est pour demain… pour l’heure place aux vins d’Alsace avec
Thierry Meyer qui nous convie pour la seconde Masterclass de l’Oenothèque Alsace.
Comme d’habitude une bonne vingtaine d’oenophiles se retrouvent dans l’espace de dégustation de la Maison Wolfberger à Colmar pour une séance proposant 3 thèmes d’étude :
- Pour ou contre les rosés de coupage
- Les terroirs alsaciens en 2007 – comparaison avec 2005
- L’évolution des rieslings moelleux : l’âge charnière.
Les vins sont servis 2 par 2, la dégustation et l’évaluation se font à l’aveugle, à l’exception des 2 premiers qui nous ont été infligés sans chaussettes.
Voici les quelques commentaires notés durant cette séance :
Les rosés : faut-il défendre la tradition française ?
1. Rosé de pays Villaray
Robe : Rose pâle
Nez : Neutre, légèrement amylique avec quelques vagues arômes de groseille si on cherche vraiment.
Bouche : Fluet, aqueux avec une finale inexistante.
Pour se désaltérer, il vaut mieux choisir de l’eau…même si certaines sont vendues plus cher que ce rosé en magnum plastique.
BOF
2. Rosé de pays Vieux Papes
Robe : Rose pâle.
Nez : Louche et peu engageant, de fumée et de caoutchouc.
Bouche : Aigrelette, fuyante et très courte.
Franchement déplaisant, quel intérêt de boire ça ?
BEURK
3. Pinot Noir rosé 2007 – Domaine de l’Oriel à Niedermorschwihr
Robe : Rose très pâle, brillante.
Nez : Discret mais très pur avec quelques touches florales et vanillées.
Bouche : Une structure équilibrée avec de la rondeur et de la fraîcheur.
Un rosé de dentelle, très fin mais qui manque un peu d’arômes à mon goût.
BIEN
4. Pinot noir rosé 2008 – Cave de Beblenheim
Robe : Rose légèrement saumoné.
Nez : Intense et charmeur avec de beaux arômes de fruits rouges (fraise, groseille)
Bouche : De la fraîcheur, du gras et une belle vinosité avec une finale assez longue marquée par quelques notes fumées.
Un rosé gourmand et charmeur avec un excellent rapport Q/P (4 euros)…un vrai vin d’été !
BIEN +
5. Muscat 2008 – M. Schoech à Ammerschwihr
Robe : Jaune pâle.
Nez : Intense et frais avec des arômes de bourgeon de cassis et de fleur de sureau évoluant vers des nuances légèrement
musquées.
Bouche : Fine et bien fraîche, délicatement acidulée avec quelques touches fumées en finale.
Un muscat à la personnalité affirmée, sapide et désaltérant.
TRES BIEN -
Conclusions :
- le rosé qui coule à flots durant l’été présente un intérêt économique certain et suscite trop souvent des pratiques viticoles peu recommandables : pourquoi s’élever contre
l’officialisation d’une déréglementation, qui a cours depuis bien longtemps chez ces fabricants de breuvages insipides et sans intérêt ?
- les A.O.C. françaises ne sont pas concernées par la loi sur le coupage : soyons exigeants et sélectifs dans le choix de nos références, il y a de quoi se faire plaisir dans
toutes les régions.
- Heureusement pour ceux qui, comme moi, sont peu sensible aux charmes des rosés, il y a des alternatives pour se réhydrater durant l’été : pinots blancs, sylvaners ou
muscats par exemple…
Les terroirs alsaciens 2007 - 2005
6. Riesling G.C. Altenberg de Wolxheim – C. Lissner à Wolxheim
Robe : Jaune pâle avec des reflets vert-clair.
Nez : Aérien et complexe avec des notes florales et miellées.
Bouche : Une structure verticale mais avec une grande ampleur. La finale est longue et profondément saline.
Un vin d’une grande pureté, une expression du cépage pleine de noblesse et d’élégance.
TRES BIEN
7. Riesling G.C. Schoenenbourg 2007 – Cave de Ribeauvillé
Robe : Jaune assez intense.
Nez : Discret et fin sur un registre floral.
Bouche : Beaucoup de droiture et de puissance avec une acidité longue et mure et une finale saline.
Un riesling racé avec un caractère bien trempé, un beau terroir bien mis en valeur.
TRES BIEN
8. Riesling G.C. Pfersigberg 2007 – Wolfberger à Eguisheim
Robe : Jaune clair.
Nez : Discret et complexe avec des nuances fruitées (fruits blancs, citron) et un peu pierreuses.
Bouche : Une acidité très verticale avec une finale saline légèrement amère.
Une expression un peu austère du cépage, un vin viril, bien typé qui ne se livre pas encore pleinement.
TRES BIEN -
9. Riesling G.C. Kastelberg 2007 – G. Wach à Andlau
Robe : Jaune assez intense avec une belle brillance.
Nez : Une surmaturité perceptible dès l’attaque mais un registre complexe sur des agrumes et de petites touches vanillées.
Bouche : Un matière ample, riche et puissante mais les S.R. et le minéralité sont encore un peu dissociés.
Un riesling qui cherche encore sa cohérence mais un potentiel évident… un placement sûr pour l’avenir.
BIEN +
10. Sylvaner Vieilles Vignes 2007 – Cave de Beblenheim
Robe : Jaune pâle.
Nez : Très discret, semble fermé.
Bouche : Une matière un peu déstructurée avec une acidité peu franche.
Je suis passé complètement à côte de ce sylvaner issu d’une parcelle de très vieilles vignes…peut-être la place dans la série, ou le fait que j’avais calibré le
palais pour un riesling…à regoûter dans d’autres circonstances.
BOF
11. Pinot Blanc Cuvée B 2007 – A. Boxler à Niedermorschwihr
Robe : Jaune très pâle, brillant.
Nez : Elégant et délicat avec d’intenses notes florales (muguet, guimauve) et quelques touches vanillées.
Bouche : Une acidité mure, une belle ampleur et un finale longue et saline.
Une palette aromatique superbe et une tenue en bouche digne d’une pointure régionale…même à 11 euros, ce pinot blanc est un must.
TRES BIEN +
12. Riesling G.C. Brand 2007 – A. Boxler à Niedermorschwihr
Robe : Jaune clair, brillant.
Nez : Une attaque discrète sur des notes florales, le fruit se manifeste progressivement à l’aération.
Bouche : Une belle ampleur, une structure droite et solide, beaucoup de gras mais l’ensemble manque un peu d’unité.
Un riesling puissant qui est encore loin de son optimum, la garde lui donnera sûrement l’harmonie qui lui fait un peu défaut aujourd’hui…un très grand vin en
perspective.
TRES BIEN -
13. Riesling Fronholz 2007– A. Ostertag à Epfig
Robe : Jaune assez prononcé, lumineux.
Nez : Expressif mais plein de finesse avec de beaux arômes d’agrumes frais.
Bouche : Opulent mais équilibré avec une acidité fine et tendue, une belle salinité et une finale longue.
Une matière puissante et savoureuse pour de riesling provenant d’un terroir non classé… un vin qui s’impose sans discuter dans le cour des
grands.
TRES BIEN
14. Riesling G.C. Altenberg de Wolxheim 2005 – Cavec du Roi Dagobert à Traenheim
Robe : Jaune clair avec des reflets argentés.
Nez : Riche et complexe avec une palette alliant les agrumes confits et les épices.
Bouche : Une structure harmonieuse avec un bel équilibre et une finale longue et délicieusement aromatique.
Le beau terroir de Wolxheim qui s’exprime après quelques années de garde. Un vin très réussi vendu à moins de 10 euros en G.D., la preuve qu’en matière de vin il
vaut mieux goûter que de se crisper sur des préjugés.
TRES BIEN
15. Riesling G.C. Kirchberg de Barr 2005 – Domaine Hering à Barr
Robe : Jaune clair et brillant.
Nez : Raffiné et séduisant avec des notes de miel, de grillé et de fumé.
Bouche : Un équilibre parfait alliant gras et minéralité. La finale est très longue.
Un riesling puissant issu d’un grand terroir qui commence sa phase de maturité.
TRES BIEN
Conclusions :
- les vins de cette série ont été d’un très haut niveau qualitatif, avec des rieslings très homogènes, de très belle facture et deux intrus différemment appréciés : le
sylvaner a souffert de ce voisinage prestigieux mais le pinot blanc a tenu la dragée haute à tous ses concurrents bien nés…
- au risque de me répéter : 2007 est très beau en Alsace…la Masterclass d’automne consacrée aux meilleures bouteilles de ce millésime a de fortes chances de nous faite
tutoyer le Nirvana bacchique !
- le terroir commence à s’exprimer plus nettement en 2005, mais les 2 vins goûtés en on visiblement encore sous la semelle…
L’évolution des rieslings moelleux
16. Riesling C.C. Sommerberg Cuvée Arnaud 2004 – Domaine de l’Oriel à Niedermorschwihr
Robe : Jaune profond avec des reflets dorés.
Nez : Intense et fruité avec des notes d’ananas frais et d’abricot soutenu par des évocations plus minérales.
Bouche : Un équilibre encore fragile entre les S.R. et l’acidité longue et profonde mais la matière est ample avec une finale droite et
longue.
Un vin opulent et gras qui peut encore gagner en harmonie si on lui en laisse le temps…son petit frère du Sommerberg vendangé avec moins de surmaturité me semble
plus facile à apprécier à l’heure actuelle.
BIEN +
17. Riesling G.C. Mambourg V.T. 1997 – M. Tempé à Zellenberg
Robe : Or clair plein d’éclat.
Nez : Puissant et complexe avec de l’orange confite, du miel, des épices puis évoluant vers des nuances de truffe.
Bouche : Opulent mais intégrant parfaitement la douceur dans une structure acide et saline très longue.
Puissant et harmonieux…un bel exercice de style dans un millésime où les équilibres n’étaient pas évidents à trouver.
TRES BIEN
18. Riesling S.G.N. 1995 – Domaine Hugel à Riquewihr
Robe : Jaune profond avec des reflets dorés.
Nez : Profond, pur et d’une grande complexité avec un bouquet d’herbes aromatiques (thym, origan, basilic…) puis des agrumes confits et
quelques notes camphrées.
Bouche : Ample et savoureux avec des S.R. (88 g) magnifiquement intégrés dans une trame acide fine. La finale est saline et très
longue.
Un vin mythique…un archétype…un hommage posthume à un grand Monsieur… Séquence émotion !
EXCELLENT
Conclusions :
En général, j’ai du mal à apprécier les rieslings moelleux dans leur prime jeunesse : je trouve que pour ce type de vin, la cohabitation entre sucres résiduels et trame acide n’est pas
toujours harmonieuse. Le vin de Claude Weinzorn, dont je possède d’ailleurs quelques exemplaires en cave, est encore trop jeune à mon goût, il n’a pas encore tout à fait trouvé sa cohérence
gustative. Les 2 autres ont bien passé ce stade et se révèlent dans leur plénitude, prêts à défier le temps et à séduire les amateurs qui auront la chance de les rencontrer.
Une fois de plus ce fut un grand moment de dégustation savamment préparé et magnifiquement orchestré par Thierry Meyer, que je remercie, une fois de plus, de continuer à nous faire partager sa
connaissance et son expérience.